gêne

gêne n.f. [ de l’anc. fr. gehine, torture, du frq. ] 1. État ou sensation de malaise éprouvés dans l’accomplissement de certaines actions ou fonctions : Elle a de la gêne à marcher difficulté, trouble ; bien-être2. Impression désagréable que l’on éprouve quand on est mal à l’aise, dans l’embarras : Son silence révélait de la gêne confusion, embarras, trouble ; aisance, aplomb, assurance3. Situation pénible due à un manque d’argent : Il se trouve dans la gêne besoin, pauvreté ; luxe, opulence, richesseRemarque: Ne pas confondre avec un gène.Être sans gêne, Fam. agir, prendre ses aises sans se préoccuper des autres.Maxipoche 2014 © Larousse 2013GÊNE (jê-n’) s. f.1° La question qu’on faisait subir aux accusés pour leur arracher des révélations. Menacés de la gêne, ils ont tout découvert [TH. CORN., Pers. et Dém. v, 2] On le retira de la gêne pour le réserver au gibet [CHATEAUBR., Natch. 2e part. vers la fin.] Par extension, les tortures qu’on inflige à quelqu’un pour lui faire dire quelque chose, pour en tirer de l’argent. Mettre à la gêne, donner la question ; et fig. soumettre à une vive peine, mettre dans un grand embarras. C’est en cette manière qu’il nous a appris qu’il fallait mettre à la gêne de tels imposteurs [PASC., Prov. 16] Si elle [la conscience] refuse de parler, c’est qu’elle est complice du crime ; il la faut faire parler par force, il la faut mettre à la gêne et à la torture [BOSSUET, Sermons, Péché d’habitude, 3] Sont-ils d’accord tous deux pour me mettre à la gêne ? [RAC., Phèd. v, 4] Donner la gêne, donner la question ; et fig. imposer un grand effort. Il ne faudrait pas donner la gêne à notre esprit, pour trouver de quoi nous entretenir avec lui [MASS., Carême, Prière 1] Se donner la gêne, s’inquiéter ; se mettre l’esprit à la gêne, faire de grands efforts. Il se donne la gène pour faire des vers. 2° Par extension, douleurs très vives comparées à celles de la question. Je ne veux point d’un fils dont l’implacable haine Prend ce nom pour affront et mon amour pour gêne [CORN., Héracl. v, 5] La recevoir [Émilie] de lui me serait une gêne [ID., Cinna, II, 2] Pour moi, j’en ai souffert la gêne sur mon corps [MOL., l’Ét. IV, 5] Je sens de son courroux des gênes trop cruelles [ID., Dép. am. v, 2] Non, non, l’enfer n’a point de gêne Qui ne soit pour ton crime une trop douce peine [ID., Sgan. 16] La pierre, la colique et les gouttes cruelles…. De travaux douloureux le viennent accabler, Sur le duvet d’un lit, théâtre de ses gênes, Lui font scier des rocs, lui font fendre des chênes [BOILEAU, Épît. X] 3° Ce qui met trop à l’étroit, mal à l’aise. Être à la gêne dans ses souliers. Il y a un peu de gêne dans la respiration. 4° L’embarras que cause le séjour d’une personne chez une autre. Restez chez moi, il y a place pour vous, vous ne me causerez pas de gêne. 5° Contrainte fâcheuse, état pénible où l’on se trouve. Que de vivre à la gêne avec un indiscret [RÉGNIER, Sat. VIII] Puis-je vivre et traîner cette gêne éternelle ? [CORN., Rodog. v, 4] Ces feintes ont pour moi des gênes trop cruelles [ID., Théod. IV, 1] Je souffre, et c’est pour vous que j’ose m’imposer La gêne de souffrir et de le déguiser [ID., Oth. I, 4] Je m’impose à vos yeux la plus dure des gênes [ID., D. Sanche, I, 2] L’hymen où je m’apprête est pour vous une gêne ! [ID., Sertor. IV, 2] Mais je ne puis souffrir qu’un esprit de travers Qui, pour rimer des mots, pense faire des vers, Se donne en te louant une gêne inutile [BOILEAU, Disc. au roi.] Le délassement le plus sûr des gênes, des bienséances [MASS., Carême, Temples.] Où le sexe, élevé loin d’une triste gêne, Marche avec les héros, et s’en distingue à peine [VOLT., Tancr. IV, 6] Quintilien n’est franc ni dans sa critique ni dans son éloge ; on y sent la gêne [DIDEROT, Claude et Nér. II, 103] Charmante maison, point de gêne ; on y est comme chez soi [PICARD, Deux Philiberts, I, 4] Terme de peinture. Synonyme de contrainte dans le dessin. Sans gêne, sans s’imposer aucune contrainte. C’est chez nous [singes] qu’à vivre sans gêne S’instruisit le grand Diogène [BÉRANG., Orang-out.] Diogène, sous ton manteau, Libre et content, je ris et bois sans gêne [ID., Nouv. Diog.] Être sans gêne, prendre ses aises sans s’inquiéter des autres. Ce monsieur est sans gêne. On dit dans un sens analogue : C’est un monsieur sans gêne ; et, avec ellipse de monsieur, c’est un sans gêne, vous êtes un sans gêne. Substantivement. Le sans-gêne, voy. SANS-GÊNE, à son rang alphabétique. 6° État voisin de la pauvreté, pénurie. Être dans la gêne. PROVERBEOù il y a de la gêne il n’y a pas de plaisir. HISTORIQUEXIIIe s. Et si tost comme il le [la] vout metre à la gehine, ele reconnut toute le [la] verité et fu arse [BEAUMANOIR, LXIX, 16] Or ont, por leur amour, perpetuel haïne, Por leur joie, tristesce, por leur pais, ataïne [fâcherie], Et por leur faus deliz, très destraignant jaïne ; Perilleuse est amor qui tel queue traïne [J. DE MEUNG, Test. 1975] XIVe s. Pour gehines et justices de le [la] ville faites au dit terme [CAFFIAUX, Abatis de maisons, p. 24] XVIe s. Je ne veulx corrompre son esprit à le tenir à la gehenne et au travail [MONT., I, 181] Quelle gehenne ne souffrent les femmes, guindées et cenglées, à tout de grosses coches sur les costez ? [ID., I, 308] Estre tiré sur la gesne [torturé] [PARÉ, VI, 14] Ilz les emprisonnoient, ilz leur donnoient la gehenne [AMYOT, Lucull. 35] Tu fais que sage de confesser la verité avant que l’on te donne la geyne pour te la faire dire [ID., Anton. 76] ÉTYMOLOGIEContraction de gehenne (voy. ce mot) ; Maine, géhaigne. Émile Littré’s Dictionnaire de la langue française © 1872-1877gêne GÊNE. n. f. Ce qui met à l’étroit, mal à l’aise, ce qui empêche d’agir librement. Cette femme est à la gêne dans son corset. Ce malade éprouve une sensation de gêne à l’estomac. Il a un peu de gêne dans la respiration. Il se dit quelquefois de l’Embarras que cause le séjour d’une personne chez une autre. Restez chez moi il y aura place pour tout le monde, et vous ne me causerez aucune gêne. Il signifie au figuré Contrainte fâcheuse, état pénible où l’on se trouve. J’éprouve toujours un peu de gêne en sa présence. Les visites de certaines personnes mettent à la gêne. C’est une gêne cruelle de ne pouvoir dire ce qu’on pense. L’obscurité de ce style met l’esprit du lecteur à la gêne. Fam., Être sans gêne, se dit des Personnes qui prennent leurs aises, sans s’inquiéter de l’embarras ou du déplaisir qu’elles peuvent causer. Cet homme est tout à fait sans gêne. On dit dans un sens analogue C’est un monsieur sans gêne, et, dans le langage populaire, C’est un sans gêne. Se mettre l’esprit à la gêne pour quelque chose S’inquiéter, se tourmenter, faire de grands efforts d’esprit. Il s’est mis l’esprit à la gêne pour trouver cette démonstration. Il signifie aussi Pénurie d’argent, état voisin de la pauvreté. Être dans la gêne. Avoir une gêne passagère. GêNE, s. f. GêNER, v. act. [1re ê ouv. et long: il est plus ouvert au 1er, et devant la syll. fém. qu’au 2d, et devant la syll. masc.] Gêne, est 1°. tortûre, peine qu’ on fait soufrir à un criminel pour lui faire avouer la vérité. Acad. = On le disait aussi simplement pour tourment.    Non, non, l’enfer n’a point de gêne.    Qui ne soit pour ton crime une trop douce peine.        Mol. Il est peu usité en ce sens. ? On le dit plus souvent des soldats qui font soufrir, injustement et par violence, ceux dont ils veulent tirer de l’argent. « Ils mirent ce paûvre paysan à la gêne, pour lui faire avouer où était son argent. ? 2°. Son usage ordinaire est pour signifier une contrainte fâcheûse; un état violent, où l’on se trouve réduit. « C’est une terrible gêne de n’oser jamais dire ce qu’on pense. « La rime et la mesûre mettent l’esprit du Poète à la gêne. « La crainte du blâme et du mépris tiènent le vice comme à la gêne. MARM.    REM. Gênes, dans le sens de douleurs est vieux.    Sur le duvet d’un lit, théâtre de ses gênes.       BOIL.   C’est le Seigneur qui nous guérit,   Il prévient nos besoins, il adoucit nos gênes.   Il délie, il brise nos chaînes.       Rouss. L’exactitude de la rime a fait préférer à Rousseau, gênes à peines. = Se doner la gêne, se mettre l’esprit à la gêne, s’inquiéter, se tourmenter. ? Il n’a le sens de peine d’esprit que dans ces phrâses; on ne dirait pas sa gêne, ni mes gênes.    GêNER, v. act. 1°. Incomoder, contraindre les mouvemens du corps. « Cet habit le gêne. « Ce corps de jupe la gêne beaucoup. = 2°. Tenir en contrainte. « Ne vous gênez pas: je ne veux pas vous gêner. « Dans chaque état on ne voit de loin que ce qui plait, et de près que ce qui gêne. SEGAUD. « La rime gêne beaucoup les poètes. On dit qu’on est gêné par le terrein, etc. quand il ne laisse pas la liberté de bâtir comme on voudrait; ce qui se dit aussi figurément d’un ouvrage, d’une afaire. = Gêné, ée, adj. Contraint. « Air gêné; taille, démarche gênée, etc.    REM. * Autrefois les Poètes disaient se gêner, pour se tourmenter.    Quoi! ne vous plairez-vous qu’à vous gêner sans cesse.       RAC. Bérén.

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